JO 2024 : l’étonnant profil des futurs agents de sécurité
A moins d’un an de l’événement, Pôle emploi a pour mission de recruter et former plus de 30 000 personnes pour assurer la sécurité de l’événement.
D’un bras, Harding Goris attrape et maîtrise doucement l’un de ses élèves. De l’autre, il écarte la fausse grenade qu’il vient de trouver dans sa poche, en faisant mine d’appeler des renforts. Dans la salle de cours de l’organisme de formation Envergure, au cœur du XIIe arrondissement de Paris, une petite dizaine de stagiaires observent la scène en prenant des notes. « Dans ce type de cas, vous isolez l’individu pour protéger la foule, vous continuez la palpation pour détecter d’éventuelles autres armes, et surtout, vous levez directement la main pour que l’officier de police judiciaire vienne vous aider », décrit le professeur. Au fil des exercices pratiques, cet agent de sécurité rappel « les bases » de la palpation : un consentement doit toujours être demandé à la personne concernée, la fouille pratiquée par un agent du même sexe ou, à défaut, être réalisée via un magnétomètre qui détectera les métaux potentiellement dissimulés. « On ne fait pas n’importe quoi : la palpation est régie par des lois très strictes », martèle-t-il, avant d’énumérer les différents textes qui encadrent cette pratique.
Autour de la table, les élèves du jour n’ont, pour la plupart, pas plus de 20 ans.
Il y a quelques mois, aucun d’entre eux ne s’intéressait aux métiers de la sécurité. Récents bacheliers, étudiants en BTS, en droit, en sciences du langage ou même en école d’infirmière, ils bénéficieront de 106 heures de formation, au terme desquelles ils décrocheront un agrément qui leur permettra d’exercer en tant qu’agent de sécurité pendant les Jeux olympiques (JO) de Paris . Si ce précieux sésame ne sera valable que jusqu’en septembre 2024, ils pourront ensuite suivre une formation complémentaire, et obtenir un diplôme d’agent de prévention et de sécurité (APS).
« C’est le job d’été rêvé », témoigne Antoine du haut de ses 20 ans. A l’étage supérieur, un autre groupe s’entraîne à un examen spécifique sur les questions de sécurité incendie. Ici, la moyenne d’âge est plus élevée : en situation de reconversion professionnelle après une première carrière de banquier, d’installateur d’œuvre d’art, de guide conférencier ou de chauffeur VTC, les élèves ont pour la plupart été guidés vers cette formation par Pôle emploi , missionné par
l’Etat pour recruter et former 30 000 personnes afin d’assurer la sécurité des JO. Leur formation de 650 heures, plus longue et plus complète, débouchera sur un diplôme d’APS. Au sein de l’école, tout a été pensé pour former ces stagiaires aux gestes pratiques : plusieurs balises numériques ont été implantées dans les couloirs pour réaliser des simulations de ronde, un poste de sécurité fictif comprenant portes automatiques, alarmes incendie ou fausse Kalachnikov a été installé au dernier étage pour plusieurs dizaines de milliers d’euros, et un robinet d’incendie armé est même disponible au rez-de-chaussée pour s’entraîner à stopper des départs de feu.
Une « enquête de moralité poussée »
Moins d’un an avant les JO de Paris, et alors que plus de 10 000 postes sont actuellement vacants dans le secteur de la sécurité , ces futurs agents ne devraient avoir aucun mal à trouver un contrat à leur sortie d’école. Mais cette situation de tension ne justifie pas pour autant un recrutement sans filtre des élèves : pour participer à une formation agréée, ces derniers – et parfois leurs familles ou leurs proches – ont ainsi fait l’objet « d’une enquête de moralité poussée », selon Najat Chamali, superviseuse sécurité chez Envergure, qui rappelle que « l’Etat ne peut prendre aucun risque ».
Ils doivent notamment présenter un casier judiciaire vierge, et n’être liés à aucune affaire judiciaire en cours. « Si certains font preuve de comportements violents durant le cursus, comme des bagarres ou des insultes, ils seront directement exclus », ajoute Najat Chamali. Une fois leur diplôme obtenu, ils pourront espérer une rémunération de « 15 euros nets de l’heure en moyenne », hors primes et heures supplémentaires – le résultat d’une revalorisation salariale de 7,5 % récemment négociée par les professionnels du secteur en prévision des JO.